Motors
Essai Suzuki Katana : une fine lame néo-rétro
Suzuki possède désormais son modèle néo rétro au catalogue, avec la nouvelle Katana. Une machine qui rejoint la petite gamme vintage du fabricant aux côtés de la SV 650X, en tirant son inspiration du passé et rendant hommage à la Katana sortie en 1981. Nous l’avons essayée.
Suzuki se met au rétro
Tous les constructeurs de motos ont désormais leur gamme vintage. Suzuki rejoint aujourd’hui le clan des japonaises rétro en proposant une machine s’inspirant du passé, avec la Katana.
Les débuts : 1981
Sortie en 1981, la Katana se déclinait alors en 550, 650 et 1100 cm3. Jusqu’à sa dernière année de production : 2000 (en Asie), elle aura été produite en 7 cylindrées distinctes ; 250, 400, 550, 650, 750, 1000 et 1100 cm3.
Un design insipide
À l’origine : Suzuki Allemagne, dont le Chef des Ventes Otto de Crignis et le Directeur Marketing Manfred Bäcker se plaignent du design de leurs motos. Les Suzuki sont pourtant les plus performantes du marché mais quelque chose cloche et empêche le fabricant nippon de faire exploser ses ventes, en retard par rapport à la concurrence.
La décision est prise de sortir un nouveau modèle, plus attrayant. Suzuki fait alors appel au nouveau cabinet de design Target Design, créé pour l’occasion par Hans Arthur Muth (ex-Chef Designer chez Bmw Motorrad), Hans-Georg Kasten (Bmw Motorrad) et Jan Fellström (Bmw Motorrad). Un trio à qui l’on doit déjà les Bmw R65 et R90.
Concevoir une moto européenne
Au cahier des charges, un objectif principal : créer une moto sportive au look sud-européen. L’équipe de Target Design reçoit une GS550 comme base de travail, afin de présenter un prototype. La machine sera lancée en 1981 mais ne rencontrera pas le succès commercial (en tout cas sur le marché européen). Elle sera retirée du catalogue en 2000 après une fin de carrière exercée en Asie.
38 ans plus tard
Trente-huit ans après la sortie du premier modèle en 1981, Suzuki remet le couvert et propose une Katana version 21ème siècle. Notre modèle d’essai reprend les codes stylistiques du modèle 1981 (sans les jantes à rayons) en conservant ce carénage particulier surmonté d’une petite bulle placée bas. Plus bas et plus courte que l’originale des années 80, ceci dit.
Certains plaisantins nous demanderont plus tard s’il s’agit de la moto d’X-OR, celle de Bioman ou de Goldorak, ce qui confirme le côté audacieux et différent de la machine.
Atypique
Un design qui partage radicalement les motards : on aime ou pas, mais il n’y a pas de demi-mesure. Nous concernant, on apprécie le côté taillé à la serpe (normal pour un katana) qui différencie la machine de la production actuelle. Suzuki a le mérite de s’être démarqué de la concurrence en proposant une moto atypique.
On aime le côté râblé de la machine, sa carrure imposante, son arrière coupé court, son Katana posé sur le haut de carénage et son feu arrière particulièrement réussi.
Pas joli-joli
Seul bémol nous concernant : le porte plaque arrière (qui sert également de support de feu). Quel dommage d’affubler la Katana d’un si grossier accessoire, parce qu’il casse le look arrière de la machine pourtant très réussi (avec une selle courte et le porte à faux) tout en dissimulant le pneu de 190 mm.
Pour remédier à cette bévue esthétique, Suzuki propose une plaque « traditionnelle » positionnée au-dessus du pneu.
En route
Une fois en selle, la première impression qui se dégage est d’être placé haut (étonnant, la selle est à 82,5 cm du sol). Avec un guidon haut et droit, la position du buste est droite avec des bras fléchis légèrement. Une posture naturelle et plutôt reposante, qui contraste avec le côté sportif de la moto à laquelle il ne manque que des demi-guidons pour confirmer son côté sauvage.
À la première impulsion sur le démarreur (sans embrayer ni mettre de coup de gaz), le 4 cylindres se met en branle tout en restant discret. Mais dès qu’on tourne un peu la poignée des gaz, on devine le potentiel acoustique de la Katana, gavée de 150 chevaux.
Un 4 pattes de 2005
Un 4 cylindres qui est celui de la GSX-R de 2005 et qui équipe la GSX-S 1000 actuelle. Un bloc qui a fait ses preuves et qui renforce le côté rétro de la Katana.
Pour la partie technique, la Katana utilise très peu d’électronique. Elle est équipée d’un ABS et d’un contrôle de traction déconnectable à 3 positions, ce qui n’est pas de trop compte-tenu de la puissance de la moto. Aucune cartographie moteur, pas de modes de pilotage bref, une moto à l’ancienne comme on les aime.
Elle est équipée à l’avant d’une fourche inversée Kayaba de 43 mm avec, cerise sur le gâteau et c’est rare, un réglage par tube au niveau de la précontrainte, de la détente et de la compression. Sur l’arrière, le mono-amortisseur central est à mon goût moins efficace, mais il est également réglable en précharge et détente.
Cachez-moi ces soudures
Le bras oscillant est en aluminium et emprunté à la GSXR modèle 2016. À noter que le cadre double poutre en alliage d’aluminium présente des soudures qui ne sont pas du plus bel effet, de chaque côté et à 2 endroits distincts. 4 « bavures » visibles qui entachent la bonne finition de la moto.
Un compteur très complet et lisible
Hélas, le compteur n’est plus à aiguille mais bel et bien de son époque. Entièrement digital, il délivre une pléthore d’informations : kilométrage total, kilométrage Trip A, kilométrage Trip B, vitesse, compte-tours, heure, température extérieure, charge batterie, consommation instantanée, consommation moyenne, autonomie restante, rapport engagé, température moteur, contrôle de traction et jauge à essence.
Autant dire qu’il y a tout ce qu’il faut côté informations et que tout tombe parfaitement sous les yeux. Problème du digital : dès qu’il fait plein soleil, les écrans deviennent illisibles mais Suzuki a pensé à tout en installant un variateur de luminosité écran sur son compteur, ce qui permet une bonne lisibilité quelles que soient les conditions météo.
Ergonomie parfaite
Les commandes elles, tombent naturellement sous les doigts. Une bonne ergonomie qu’il faut souligner et un 20 sur 20 pour l’emplacement de la commande des feux de détresse, placé côté droit du guidon et qui s’enclenche très facilement. Le déroulement des informations compteur se fait quant à lui à partir de la poignée de gauche et le encore, tout tombe parfaitement sous les doigts.
Il est temps de faire tourner les roues de cette Katana et j’enclenche la première. Le poids de la machine (de 215 kg) est placé haut et le rayon de braquage n’est vraiment pas top, ce qui ne fait pas d’elle la citadine idéale mais ça, on s’en doutait un peu.
Un TGV à 2 roues
En revanche, une fois sur l’autoroute et par fort vent et pluies éparses (ah la météo francilienne en plein milieu du printemps !..), la machine ne bouge pas. Fixée sur un rail, la Katana est rigide par son cadre périmétrique repris à la GSX-S 1000 (mais également par sa suspension, réglée un poil trop dure), précise et puissante. Certes il n’y a pas de protection, de bulle il n’y a que le nom car trop petite et trop basse mais sur ce type de roadster il fallait s’y attendre. La tenue de route est impeccable et le gros pneu de 190 mm à l’arrière permet d’optimiser la stabilité de la moto sur routes abimées (raccords de goudrons, fissures, trous et rainurages). D’ailleurs, les rainures de l’autoroute A13 après la montée de Poissy ne m’ont absolument pas gêné, plutôt rassurant.
À noter que la moto bénéficie des tout nouveaux pneus Dunlop Roadsport 2 qui sont excellents, sur le sec comme le mouillé.
Moteur « Old School »
Le moteur de la Katana est « Old School » et tout compte fait très agréable. Datant de 2005 (il équipait la GSX-R 1000 de l’époque) il possède les qualités de ses défauts parce qu’il a du caractère, même s’il prend moins de tours que les motos contemporaines. Il ne dispose pas de cartographies moteur, pas de mode de pilotage mais c’est très bien comme ça.
La Katana dispose d’un gros couple : 108 Newton Mètre à 9 500 tours/minute, qui la rend vraiment agréable à piloter. La puissance est là à tous les étages, repartant sans tousser en 6ème et à 40 km/h jusqu’au sommet du nombre de tours indiqué sur le compteur : 13 000 tr/mn avec une zone rouge qui démarre à 11 500 tr/mn, la Suzuki se veut alors plus rageuse et émet un borborygme caverneux et puissant de son petit pot d’échappement.
Une sonorité très réussie
Ce dernier ne paie pas de mine, mais il est redoutable de sonorité dès que vous montez dans les tours, donnant la banane au pilote à l’approche du moindre tunnel. Suzuki propose au catalogue un pot Akrapovic mais celui qui est fourni de série est à mon goût bien suffisant et à la sonorité équilibrée. Un très bon point pour Suzuki.
Sportive ?
Sur routes sinueuses et avec 150 chevaux sous la selle, la Katana incite forcément à l’arsouille. Le freinage est bon sur l’avant sans être aussi radical qu’une hyper-sport et un poil léger sur l’arrière, on peut donc s’autoriser quelques montées de régime et passages de courbes en penchant la moto, qui se laisse faire dans l’ensemble. Ceci étant, le poids placé un peu haut et le guidon droit limitent le caractère « sportif » de la Katana.
Quand on arrive en ville
La ville n’est pas le terrain de jeu favori de la Katana, en raison de son poids placé haut et surtout de son rayon de braquage très limité. Ceci étant, la position droite du pilote et la hauteur de selle (82,5 cm) permettent d’avoir une vue dégagée et lointaine du flot de circulation, un plus dans les bouchons.
Bien vu : la commande des feux de détresse
En remontée de files sur le périphérique parisien, par exemple, on appréciera la commande de feux de détresse judicieusement placée à droite du guidon et activable d’un simple coup de pouce, bien joué Suzuki.
Idem pour les appels de phare dont la commande elle, se place sur le côté gauche du guidon et qui est très facilement accessible. Un phare à LED qui se décompose en 2 parties horizontales : le rectangle supérieur pour le feu de croisement et la partie inférieure pour le phare. Des feux qui éclairent bien la route et qui préviennent bien les automobilistes de votre arrivée et par conséquent, efficaces.
Feux et Kabuto
Avec les veilleuses placées sur les côtés et sous le phare avant, on peut visuellement et de nuit deviner un Kabuto ; le casque des guerriers japonais. Voulu de la part de Suzuki ou simple coïncidence ?
Petit bémol : le klaxon, un poil léger pour une moto de ce gabarit, un son plus puissant et grave serait bienvenu.
Entre 2 feux et pour s’arrêter, la recherche du point mort est facile et le passage des vitesses agréable. La boîte est douce, comme la poignée d’embrayage, mais nous avons noté qu’en cas de passage rapide de la 1ère à la seconde, il arrive que la 2è saute et l’on se retrouve au point mort.
Large de 83 cm, la Katana se faufile assez facilement (pour comparaison la Kawasaki Z900 RS affiche 86,5 cm, la Honda CB 1000 R 78,9 cm et la Honda CB 1100 83 cm également), mais une fois de plus, c’est dans les grands espaces qu’elle sera le plus à l’aise. Pour rappel, la Katana de 1981 accusait seulement 71,5 cm de largeur, ce qui comme pour l’automobile confirme la tendance actuelle du « toujours plus grand, plus haut et plus large ».
Le sujet qui fâche : l’autonomie
Mais où sont passés les 21 litres du réservoir de la Katana d’antan ? Aujourd’hui, la Suzuki dispose de seulement 12 litres dans sa gourde pour nous emmener en balade. Avec une consommation moyenne de 6,1 litres (ville/périph/autoroute/nationales sur 500 km sans arsouiller) le calcul est vite fait, l’autonomie moyenne est de 170 km avant que la réserve ne s’allume. Mauvais point pour Suzuki, même si l’autonomie restante, la jauge, la consommation moyenne et instantanée sont indiquées au compteur.
Un 4 cylindres de 150 cv pour une machine de 215 kg avec un réservoir de seulement 12 litres, il y a comme un non-sens Suzuki, non ?
Prix et concurrence
La Suzuki Katana est vendue 13 699 euros. Face à elle on peut positionner la Kawasaki Z900 RS vendue 11 999 euros soit 1 700 euros moins chère mais la Kawa n’affiche « que » 111 chevaux. La Honda CB 1000 R peut également jouer dans la même cour, au tarif de 13 449 euros, une machine mieux équipée que la Katana (cartographie moteur) pour 500 euros de moins et affichant 145,5 chevaux.
Yamaha dispose de son côté de la MT10 contre un chèque de 13 999 euros, soit 300 euros de plus que la Katana, pour un 4 cylindres de 998 cm3 développant 160,4 chevaux.
L’avis de l’expert
Compte-tenu des avis tranchés et opposés des motards vis-à-vis de la Katana 2019, nous avons contacté Alexandre Godard, le président du Club Katana France, une association à but non lucratif créée le 26 juillet 2011 et qui a pour vocation de réunir les fans de la Katana des années 80. Un groupement qui réunit aujourd’hui une trentaine de membres.
Monsieur Vintage : « Alexandre, vous êtes le président du Club Katana France et à ce titre, quel est votre avis concernant la version 2019 de la Katana ?«
Alexandre Godard : « Enfin une Suzuki qui a de la gueule ! Comme à l’époque de l’originale, la gamme manque de personnalité, et la Katana y apporte un grain de déraison bienvenu. C’est un très bel hommage à l’original, une moto saine et amusante, une « vraie moto », sans chichis électroniques ou gadgets à la mode, qui tient la route, avance fort et sur laquelle on prend plaisir à s’admirer dans la vitrine des magasins ! D’ailleurs, quand la GSX-S est sortie, quelle déception de voir ce nom illustre sur une moto aussi moche. Le tort est maintenant réparé, merci Suzuki.
Des reproches ? Ouais : le réservoir de 12 litres est ridicule à l’heure où l’on parle de « range anxiety » pour les véhicules électriques. Et je ne suis pas fan des stries façon « Testarossa » sur les flancs du carénage, mais je les pardonne volontiers au designer Rodolfo Frascoli, vu ses origines !!! Et niveau concept : bon, son dessin ne révolutionne pas le design moto comme son ancêtre, mais je suppose que si cela avait été le cas, nous n’aurions pas admis qu’elle s’appelle Katana ! Bref.
Voilà une néo-rétro qui ne fait pas vieillot (je n’ose pas dire « vintage »), je la qualifie même plutôt de néo-rétro-futuriste. »
Pour découvrir le site du Club Katana France, cliquez sur ce lien. Pour leur page Facebook, c’est ici.
Quelques images prises lors de la Sunday Ride Classic en mai 2019 et aimablement fournies par le Club Katana France (crédit photo : Jacques Courchelle©) :
Bilan
La Suzuki Katana, on aime ou on déteste. Mais elle a le mérite de ne pas laisser indifférent et de proposer quelque chose de nouveau dans le paysage moto actuel. 1 000 à l’ancienne avec un bon couple et une sonorité remarquable, la Katana s’appréciera davantage dans les grands espaces qu’enfermée dans une ville étriquée.
Les plus
Le moteur
Le design
L’audace
Le son
Le tableau de bord
Les moins
Le réservoir de 12 litres
Les soudures sur le cadre
Le porte plaque
FICHE TECHNIQUE SUZUKI KATANA 2019
MOTEUR
Type : 4 cylindres en ligne, 4 temps, refroidissement liquide, DOHC
Cylindrée : 999 cm3
Puissance annoncée : 150 ch à 10 000 tr/min
Couple Annoncé : 108 Nm à 9 500 tr/min
Alimentation : Injection Electronique
Démarreur : Electrique
Consommation : 5.3 l/100km (constructeur) – 6,1 l/100km (notre essai)
Émission CO2 : 122 g/km
TRANSMISSION
Boite : 6 rapports
PARTIE-CYCLE
Cadre : Double berceau en aluminium
Empattement : 1460 mm
Suspension avant : Fourche inversée 43 mm Kayaba réglable, ressort hélicoïdal
Suspension arrière : Monoamortisseur Kayaba réglable, ressort hélicoïdal
Jantes : Aluminium
Freins avant : 2 disques semi-flottant de 310 mm. 4 étriers avant radiaux Brembo – ABS
Frein arrière : 1 disque étrier 2 pistons – ABS
Pneu avant : 120/70 ZR 17 M/C
Pneu arrière : 190/50 ZR 17 M/C
DIMENSIONS, POIDS, CAPACITÉS
L x l x H : 2 130 x 835 x 1 110 mm
Hauteur de selle : 825 mm
Garde au sol : 140 mm
Essence : 12 l
Huile : 3.4 l
Poids : 215 kg
TARIF 13 699 EUROS
NOTRE GALERIE D’IMAGES (crédit photo Éric Bodin©)
Crédit photo : Éric Bodin©/Philippe Pillon©/Suzuki© et Jacques Courchelle©
Fondateur du site MONSIEUR VINTAGE le 14 février 2014, Philippe est issu de la presse écrite automobile : Auto Plus, Sport Auto, Auto Journal, Décision Auto, La Revue Automobile et La Centrale. Il collabore également au magazine EDGAR comme responsable de la rubrique auto/moto.
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