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"L'âme du vin" : sortie cinéma demain 13/11/2019

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Une fois n’est pas coutume, Monsieur Vintage annonce la sortie demain dans les salles non pas d’un film, mais d’un documentaire à ne pas rater si vous êtes amateur de vin. « L’âme du vin », réalisé par Marie-Ange Gorbanevski vous ravira par ses belles images et la découverte de grands vignerons de Bourgogne.

lame du vin affiche - Vintage

Les vins de Bourgogne : vaste sujet que nous évoquions le 25 octobre au travers d’un road-trip de découverte à réaliser en moto. Aujourd’hui et en parfait raccord avec notre dossier du mois dernier, nous voulions évoquer un film qui sortira dans les salles demain mercredi 13 novembre 2019 : « L’âme du vin ».

Réalisé par Marie-Ange Gorbanevski (« Une leçon de musique » sorti en 2014, « Les dentellières » en 2008, « Le plus grand marché du monde » en 2006, « Promenade dans un jardin » en 2002 et « Le délice de l’escargot » en 2000), ce documentaire d’une heure quarante met en valeur l’âme et la philosophie des grands vignerons ( Romanée-Conti etc … ) à l’origine de leur vin. C’est un voyage au cœur du travail de la vigne à l’aboutissement des grands millésimes, en passant par la philosophie autour de cette épopée.

Nous avons vu le film en avant-première, c’est un très bel ensemble d’images des vignes bourguignonnes et de témoignages de passionnés qui font le vin. Nous vous proposons de découvrir ce qui l’entoure par un entretien entre Bernard Pivot et la réalisatrice.

SYNOPSIS

Les vins naissent de la rencontre de la terre, du ciel, et de l’homme… Chaque année en Bourgogne, la réussite de leur millésime est une véritable épopée. Le travail de la vigne et de la cave au fil des saisons aboutit à la création de vins exceptionnels, vivants, recherchés et adulés dans le monde entier : Romanée-Conti, Gevrey-Chambertin, Chambolle-Musigny, Meursault, Volnay… Ces vins portent en eux la parcelle de terre dont ils sont issus et l’âme des hommes qui leur ont donné vie.

ENTRETIEN AVEC MARIE-ANGE GORBANEVSKY
PAR BERNARD PIVOT

Avant de réaliser ce film qui s’intitule L’Âme du vin, quels étaient vos rapports, vos relations avec la vigne et le vin ?

En fait, je n’avais pas beaucoup de relations avec le vin. Je buvais du vin mais je n’ai jamais bu ce type de vin qu’il y a dans le film. Je ne savais pas ce qu’était un grand vin.

Qu’est-ce qui vous a déterminé ? Qu’est-ce qui vous a encouragé à faire ce film ?

Un jour j’ai rencontré de grands amateurs de vin. Ils parlaient beaucoup de domaines que je ne connaissais pas. Même phonétiquement j’étais incapable de prononcer les noms qu’ils nommaient. Je me suis rendue compte que plus ils en savaient, plus ils avaient gouté de vins, plus ils voulaient en rencontrer d’autres. J’ai eu l’intuition, en les écoutant parler, que le vin était un monde sans contours, un monde vaste, très vaste.

Au fond, votre ambition en faisant cela, c’était d’apprendre, tout simplement ?

En fait, je ne fais pas un film pour apprendre, je fais un film pour transmettre quelque chose. J’ai une intuition et je vais découvrir un monde que je ne connais pas. Bien sûr, je devais apprendre, écouter,me laisser guider par les grands vignerons, par mes lectures, par les sommeliers et par Jacques Puisais, qui m’ont donné des leçons. Et ces leçons m’ont permis de trouver mon chemin jusqu’à ce film. Mais mon but premier ce n’est pas d’apprendre, c’est de transmettre.

Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser aux vins de Bourgogne ?

J’ai lu des livres sur l’histoire du vin en général. Ma passion pour l’art m’a orientée très vite vers la Bourgogne. Je suis très attachée à la Bourgogne par ses arts. Pour moi, les vins de Bourgogne ont un lien avec l’art médiéval que j’aime tant. Ces grands vins datent du Moyen-Âge… Il y a aussi là-bas un rapport à la terre, à la vigne et au vin qui m’a beaucoup touchée.

Donc c’est plus l’art qui vous a amenée à vous intéresser aux vins de Bourgogne plutôt que, disons, votre amour du vin, votre gourmandise.

Oui, tout à fait.

Ce qui m’a fasciné dans votre film, c’est la beauté des images. Même la vigne l’hiver est belle dans votre film. On sent que vous avez une sorte de culte de la beauté.

Les images sont belles parce que ce qu’on a filmé était beau. Je n’ai rien dénaturé. Avec mon équipe, on a travaillé avec beaucoup d’humilité. On n’avait rien à rajouter, c’était beau.

Je trouve que vous avez une vision contemplative qui me rappelle, par exemple, un de ces grands cinéastes que j’adore, c’est Jean Pierre Melville.

Vous savez, Jacques Puisais m’a dit plusieurs fois : « L’Homme remplace par la vitesse le mouvement des éléments de la vie ». Par le rythme du film, j’ai essayé de retrouver ce mouvement des éléments de la vie. Quand vous vous promenez dans une forêt, quand vous allez en haut de l’Abbaye de Saint-Vivant, le temps est lent. Et dans les caves, le vin met 18 mois pour être élevé dans un fût. Il faut du temps pour que ça pousse, il faut du temps pour que la vigne donne du bon vin, il faut du temps pour que les racines aillent en profondeur. Donc ce rythme, c’était pour moi retrouver le rythme de la vie. J’ai voulu être fidèle à mon sujet.

Dans cette austérité, il y a quand même une exception, ce sont les vendanges. Alors là, il y a une joie qui éclate dans les vignes. Et puis il y a de la musique, vous avez mis un très beau morceau de jazz et le contraste est saisissant entre les vendanges et le reste de l’année du vigneron.

Oui, j’ai observé les vendanges l’année d’avant pour les filmer l’année d’après. J’ai fait cela pour être fidèle, ce n’est pas une vision de mon esprit. Je voulais être le plus fidèle possible.

Dans la Romanée Conti !

Dans différents domaines, à la Romanée-Conti, chez Christophe Roumier à Chambolle-Musigny, chez Fréderic Lafarge à Volnay et chez Dominique Lafon à Meursault. Les vendanges c’est un moment de peine mais aussi de joie. En fait, ce que j’ai voulu montrer, c’est la joie des vendanges. J’ai choisi ce morceau de Django Reinhardt et Grappelli qui est vraiment la plus belle version que j’ai trouvée de ce morceau Minor Swing, un enregistrement des années 30. Il y a tant de joie dans cette musique, la joie monte crescendo comme dans les vendanges, ça rigole, ça fuse de partout, c’est drôle, c’est très humain, et cette musique, non seulement elle est joyeuse mais elle est très humaine.

C’est saisissant le contraste entre ces minutes qui racontent les vendanges, qui sont admirables. Et puis le reste du film qui est évidemment plus dans une sorte de paix, de lenteur, de réflexion etc… et de science. Alors, il y a plusieurs fois des chevaux qui tirent une charrue. C’est pour montrer qu’on est dans la biodynamie ou bien parce que là vous avez voulu vous faire plaisir, parce que c’est beau un cheval qui rentre dans les rangs, qui passe avec la charrue et le laboureur derrière qui tient la charrue et qui passe…

Tous les domaines que j’ai filmés sont en biodynamie, à part Christophe Roumier qui est en biologie et non en biodynamie. Ce sont des gens qui respectent beaucoup leur terre, leur vigne et leur vin. Je suis allée uniquement chez des gens qui ont un grand respect de cette nature et de leur travail. Dans le Domaine de la Romanée-Conti, plusieurs parcelles sont labourées à cheval. Dans le film on ne voit pas des chevaux, on voit un cheval. C’est toujours le même cheval, c’est toujours le même laboureur qui laboure de Novembre à juillet. Il y a différents labours. Je me suis fait plaisir, en même temps, ce cheval rythme les saisons. Et il est vraiment là, il n’est pas venu pour moi. Je n’ai rien mis en scène. Tout le travail que je filme au long du film, c’est du vrai travail.

Vous avez filmé des vignerons exceptionnels : Aubert de Villaine pour la Romanée-Conti, Dominique Lafon pour le Domaine des Comtes Lafon, Christophe Roumier, Frédéric Lafarge et d’autres. Vous avez quand même une chance exceptionnelle de rencontrer ces gens qui sont les plus connus, les plus célébrés, les plus recherchés de la Bourgogne.

J’ai eu beaucoup de chance. J’ai eu énormément de chance parce qu’ils ont chacun donné quelque chose d’extraordinaire au film, chacun à sa façon. J’ai compris très vite que j’étais avec de grands solistes. Ce sont des stradivarius du monde du vin. Pourtant ils sont tous très différents. Ils m’ont vraiment portée, ils m’ont aidée, ils m’ont guidée, toujours avec beaucoup d’élégance et de délicatesse. Jamais ils ne m’ont dit « il faut que vous filmiez ça, il faut que vous montriez ça ». Aubert de Villaine a été extraordinaire, il avait entièrement confiance en moi. J’ai eu le droit d’aller dans ses caves à bouteilles pendant des heures pour comprendre comment les filmer.

Tous leurs témoignages sont éloquents et assez remarquables. Je dois en détacher un quand même. C’est Bernard Noblet, le chef de cave de la Romanée-Conti qui a pris sa retraite récemment. Il parle de sa science avec une humilité. La manière dont il parle de la vie des ceps, ça vous a frappé aussi ?

Bernard Noblet est un monsieur extraordinaire. Il a une grande humilité. Quand je lui disais « Bernard, vous qui connaissez le vin », il me répondait « Ne dîtes pas ça ! Je ne connais pas le vin ! On ne connaît jamais le vin! C’est comme si vous disiez que vous avez fait le tour d’une personne, on n’en fait jamais le tour ». Ce qui est extraordinaire avec Bernard, c’est qu’il peut expliquer des choses très complexes
avec des mots très simples.

Et alors pour déguster, là aussi vous avez eu recours à deux grandes figures, Olivier Poussier et Jacques Puisais.

Oui et à Caroline Furstoss, la seule femme du film. En fait, comme je ne connaissais rien au monde du vin, j’ai regardé quelques dégustations sur Internet et j’ai vu Olivier Poussier. Je ne savais pas qu’il était meilleur sommelier du monde. Il m’a touché par sa passion, son amour du vin. J’ai demandé conseil à Philippe Bourguignon qui est pour moi le prince des sommeliers et qui m’a beaucoup aidée pour ce film. Olivier Poussier est une Ferrari de la dégustation, c’est incroyable. J’ai beaucoup parlé avec lui avant le tournage, je savais donc quels vins le toucheraient. Il n’a pas voulu savoir quels vins il allait déguster avant le tournage, pour garder sa spontanéité.

J’ai adoré une séquence qui est extraordinaire, qui est celle des deux Japonais qui vont boire une bouteille rarissime, exceptionnelle, un Chambolle-Musigny ‘Les Amoureuses’ 1945. Ils sont presque hébétés devant la chance qui est la leur.

On est troublé par leur émotion. Ils ont su dire des choses très importantes et essentielles sur le vin. C’est un vin d’un certain âge. Un des Japonais dit : « C’est une ligne très fine qui ne dévie pas, comment peut-il avoir une telle force ? ». J’ai déjà entendu Jacques Puisais utiliser la même image pour parler d’un vin qu’il appelle «sage», c’est-à-dire un vin d’un vieux millésime. Les Japonais ont su dire l’essentiel.

Alors est-ce que le film a changé vos relations avec le vin ?

Ce qui est sûr, c’est que ce film a changé mon rapport avec la nature. Je me suis aperçue que la terre était vivante. Je n’en avais pas conscience avant. Quand on parle des climats de Bourgogne, on parle de parcelles de vignes. En les observant, je me suis aperçue que la terre des Richebourg n’était pas du tout la même que celle de La Tâche, que celle de la Romanée-Conti, ou de la Romanée-Saint-Vivant, qui pourtant, est juste de l’autre côté du chemin. Même d’un jour à l’autre, la terre peut être différente, comme quelqu’un qui a bonne ou mauvaise mine. J’ai pu observer les choses, me rendre compte que tout était vivant, même le brouillard. Avec ma caméraman, on a filmé le brouillard un matin.

On observait le brouillard qui bougeait. On était très proche du mouvement des éléments de la vie dont m’avait parlé Jacques Puisais. Et ça, c’est une leçon très importante que m’a donnée le film. Je me suis rendue compte que le travail du cinéaste est très proche de celui du vigneron, on fait tout ce qu’on peut tout le temps. On fait des efforts pour trouver les bons chemins, pour faire les bons choix etc… Mais au final, l’essentiel nous échappe. Pour qu’un film soit réussi, c’est comme pour un grand vin, on fait tout ce qu’il faut à notre hauteur mais il y a un petit supplément d’âme qui est là… et dans le cinéma, et dans le vin. C’est pour ça que le vin est une culture, un art, un artisanat, on l’appelle comme on veut. C’est quelque chose qui est connecté au vivant, comme le cinéma. Je l’avais ressenti au départ quand je me suis dit « Je vais faire un film sur le vin » et que Jacques Puisais m’a dit : « Vous savez, l’essentiel dans le vin est invisible ». Je lui avais répondu « Ça tombe bien, j’aime bien filmer l’invisible».

Après Baudelaire, comment définiriez-vous, après cette année passée dans les vignes de Bourgogne, l’âme du vin ?

Une âme on ne la définit pas en fait. Une âme, on tourne autour. J’ai simplement essayé de l’effleurer, de la suggérer, de l’approcher. Après, les gens qui vont voir le film, vont trouver ce qu’ils veulent. Ce que j’ai découvert en faisant ce film, c’est que le vin est là pour nous amener à quelque chose de plus haut, de plus important que le vin. En tournant autour du vin, de ces vignes, de ce travail, en observant la nature et le travail de la vigne au fil des saisons, en regardant le ciel, en observant les éléments, la pluie, le vent, je me suis rendue compte que le vin était très proche du mystère de la vie… Vous comprenez ? Le vin nous aide à rentrer en contact avec quelque chose d’impalpable qui est la vie, qui est cette nature, vivante. Pour moi, c’est ça l’âme du vin.

L’HISTOIRE DU VIGNOBLE DE BOURGOGNE

En Bourgogne, un «Climat» est une parcelle de vigne, soigneusement délimitée et nommée, qui bénéficie de conditions géologiques et climatiques particulières. Les Climats ont été façonnés, délimités et protégés par les moines, ducs, rois et vignerons qui se sont succédés à travers les siècles.
Chaque «Climat» donne un vin bien particulier qui ne ressemble pas au «Climat» situé juste à coté. Leurs noms datent du Moyen-âge : Chambertin, Clos de la Roche, Clos des Chênes, Les Amoureuses, Romanée Conti… Il en existe plus d’un millier sur un mince ruban courant de Dijon à Santenay, au sud de Beaune. À Versailles, la cour buvait du vin de Bourgogne. En 1760, le Prince de Conti, cousin de Louis XV, rachète la Romanée pour une somme extravagante. La Romanée devient : la Romanée-Conti.
En 1936 : Mise en place des AOC (Appellations d’Origine Contrôlées). Les différents Climats sont hiérarchisés en Appellation Régionale, Village, Premier Cru et Grand Cru.
Depuis 2015, les Climats de Bourgogne sont inscrits au Patrimoine de L’Unesco.

Un travail d’un minimalisme et d’une pureté exceptionnelle :

Les raisins sont issus d’un seul et unique cépage : pinot noir pour les rouges et chardonnay pour les blancs. On ne mélange jamais les raisins issus de deux «Climats» différents car chaque vin est l’expression d’un seul «Climat».
La fermentation alcoolique résulte des levures naturelles présentes sur la peau du raisin. Aucun produit qui aiderait le vin à fermenter ou à «devenir meilleur « en gommant ses défauts n’est utilisé.
La définition de «vin de terroir» prend tout son sens car le premier devoir de ces vignerons est de laisser la terre s’exprimer à travers leurs vins.
Les vignerons qui ont participé à ce film travaillent en biologie ou biodynamie depuis de nombreuses années. Ils n’admettent aucun engrais chimique, désherbant et pesticide de synthèse. À la vigne et en cave, ils redoublent d’attention et d’écoute, afin de travailler en harmonie avec les cycles de la nature, de la vigne et du vin.

L’âme du vin – Un film de Marie-Ange Gorbanevski – durée : 1H40MN – sortie cinéma : 13 novembre 2019

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